Verbalisé à tort avec un radar-mobile : le scandale de la procédure de contestation
Manquement d’un agent chargé des contrôles de vitesse avec radar nouvelle génération de type MILLIA GATSO. Non-respect de la signalisation réglementaire en conformité avec les prescriptions d'un arrêté interministériel.
RÉCIT A CHARGE, TÉMOIGNAGE EN RÈGLE
Broyé dans l’étau administratif entre marasme notoire, incompétence manifeste, légèreté hors-norme et sentiment de toute-puissance, l’Etat français m’aura pris un temps et une énergie inimaginables à défaut de tenter de me « soutirer » 90 euros puis 250 euros et enfin plus de 400 euros à l’issue d’une procédure d’abattage. Non-conformité aux prescriptions de l’instruction interministérielle, lettre recommandée non traitée par le secrétariat du ministère public, huissier de justice, comparution au Tribunal de Grande Instance avec demi-journée d’attente en salle d’audience, jugement et condamnation à la peine maximale avant déclaration à la barre, documents juridiques fournis par le procureur de la République et le greffier périmés ou erronés, multitudes de courriers postaux à gérer, délais de traitement qui dépassent l’entendement, frais à ma charge… Le fonctionnement de notre administration relève de la folie.
2. Contestation en ligne sur www.antai.gouv.fr et paiement consignation
Délai 4 jours
4. Démarche Conseil départemental / Unité technique territorial pour obtention arrêté
6. Envoi arrêté départemental à l’OMP du tribunal de police
Délai 2 mois
7. Retour OMP => poursuite par ordonnance pénale avec transmission dossier juge proximité
Délai 3 mois
Délai 5 mois
9. Remise de pli par huissier de justice pour convocation tribunal
Délai 15 jours
Délai 10 mois
11. Obtention décision de justice et formulaire de remboursement consignation
Délai 3 mois
12. Remboursement de la consignation
DÉLAI DE TRAITEMENT DU DOSSIER DEUX ANS
Début janvier 2018, je reçois un avis de contravention qui m’informe avoir été contrôlé à la vitesse de 66 km/h, pour une vitesse maximale (prétendument) autorisée inférieure ou égale à 50 km/h (retrait de 1 point et 90 € d’amende).
Dans la mesure où j’emprunte quasi-quotidiennement la départementale où le contrôle radar a été effectué, je réalise immédiatement qu’il y a un problème. Après vérification sur place du panneau de limitation, l’erreur manifeste de l’agent est confirmée. La voie en question est bien limitée à 70 km/h et non 50 km/h dans le sens où je circulais. Il se trouve que d’après le panneau de signalisation visible dans le sens inverse de circulation, la vitesse semble être limitée à 50 km/h, ce qui a probablement induit l’agent en erreur (involontairement ou pas).
Quelques jours après, je reçois un accusé de réception m’informant du traitement de la requête par les services ANTAI. On m’indique aussi la possibilité de suivre l’évolution de la démarche sur www.antai.gouv.fr (aucun suivi de dossier n’a été possible via ce site).
En parallèle un courrier postal de l’officier du ministère public de la cellule contestation vitesse (un service dédié existe...) basée à Rennes m’est également adressé pour m’informer de la transmission de mon dossier à l’officier du ministère public du tribunal de police et qu’il appartiendra à ce dernier d’apprécier la suite à donner à cette affaire et de m’en faire part.
A la lecture de cet arrêté, je constate à ma grande surprise que la vitesse n’est pas limitée à 70 km/h dans un seul sens de circulation mais bien dans les deux. La signalisation réglementaire conforme aux prescriptions de l’instruction interministérielle sur la signalisation routière n’est donc pas respectée. Cette entorse à la loi laisse supposer un grand nombres de verbalisations abusives sur cette route sans que les victimes n'aient eu la possibilité de réaliser le vice (involontaire ou non) et donc de faire valoir leurs droits. Il serait légitime que l'Etat répare rétroactivement le préjudice de l'ensemble des personnes verbalisées à tort.
Dans l’intérêt général je signale en retour le manquement de l’article 2 du présent arrêté et informe l’unité technique qu’un courrier va être adressé à l’ensemble des personnes mentionnées dans l’article 3 et 4. Le lendemain, le panneau de signalisation 50 km/h était remplacé par un 70 km/h.
L’arrêté départemental en main, je tente de compléter mon dossier « infraction » sur www.antai.gouv.fr, malheureusement aucune possibilité ne s’offre à moi. Je suis contraint d’adresser une lettre recommandée à l’officier du ministère public du tribunal de police accompagnée de l’arrêté départemental comme preuve incontestable de ma bonne foi.
Suite à l’envoi de ce courrier, je pense naïvement que l’affaire sera vite réglée et qu’un courrier de classement de l’affaire sans suite accompagné d’un formulaire de demande de remboursement me sera rapidement adressé par l’officier du ministère public.
Suite au jugement, intervenu rappelons-le environ un an après l'erreur manifeste de l'agent chargé des contrôles de vitesse, je pense une nouvelle fois naïvement que la décision de justice me sera adressée rapidement afin de pouvoir obtenir le remboursement de la consignation de 135 euros dans un délai raisonnable.
Un mois plus tard, je reste sans nouvelle de mon jugement et de la décision de justice écrite prononcée par le juge. Comme il est impossible de les joindre par téléphone, je suis contraint de retourner au TGI. L'accueil m'indique qu'il faut compter deux mois avant de recevoir sa décision de justice par courrier. On me propose toutefois de remplir un document appelé "demande de copie d'une décision de justice / certificat de non appel". Formalité que j'exécute avant de prendre congé.
Avril 2019, le courrier ne m'a toujours pas été adressé. Je trouve le délai anormalement long et décide de retourner au tribunal pour les relancer, en vain. Aucune information supplémentaire ne m'est communiquée. On me répète la formule classique "ça peut être long"... Je précise tout de même que ça fait 1 an et demi que je dois être remboursé d'une consignation. Mon interlocuteur n'en a manifestement rien à faire.
Quatre mois plus tard, nous sommes au mois d'août. Je suis toujours dans l'expectative. Aussi surprenant que cela puisse paraître, le courrier n'arrive toujours pas. Je trouve cela incroyable et me rends à nouveau au TGI. J'expose à nouveau les faits à mon interlocutrice qui semble cette fois ci un peu plus empathique. Elle tente de joindre le bureau des greffes, en vain. Ils sont injoignables. Elle comprend aisément que je suis dépité et me communique finalement une adresse mail qui me permettra de relancer pour peut-être obtenir des informations. J'adresse donc un mail et j'obtiens une réponse où l'on m'informe que mon jugement est en attente de signature et qu'il me sera envoyé dans les meilleurs délais. Enfin une information concrète, je sens que ce n'est plus qu'une histoire de quelques jours…
Un mois plus tard, toujours rien. Je relance à nouveau. Cette fois-ci on m'explique qu'il y a un manque d'effectif et que malgré cela je recevrai mes documents dans les prochaines semaines. Il semblerait qu'un traitement de faveur me soit accordé. Le surréalisme prend soudainement tout son sens... C'est de l'art.
Début octobre 2019, je reçois enfin un courrier. Il s'agit de la copie du certificat de non appel que j'avais demandé lors de mon premier déplacement au tribunal en avril 2019. Le document est erroné, la mention "condamné" apparaît en lieu et place de "relaxé". Par ailleurs ce document ne me sert strictement à rien, c'est la décision de justice accompagnée du formulaire de remboursement dont j'ai besoin.
J'adresse à nouveau un mail au tribunal de police en expliquant que je suis toujours dans l'attente de mes documents nécessaires au remboursement et indique qu'un document contraire à la vérité a été établi. Je demande que mon message soit transmis au greffier chargé des certificats de non appel pour qu'un certificat exact me soit renvoyé dans les meilleurs délais.
La réponse ne se fait pas attendre. Le lendemain je reçois un mail du greffier en question. Manifestement piqué au vif, la teneur du message est expéditive et condescendante. On me fait savoir « qu'en aucun cas une adresse mail aurait dû m'être communiquée car strictement réservée à usage interne aux auxiliaires de justice et que plus aucune réponse ne me sera faite par ce biais ». Pour « toute information complémentaire » on me laisse le numéro de téléphone du tribunal, évidemment injoignable. Le message se poursuit par une réaction virulente concernant l'erreur survenue sur le certificat de non appel. On me demande de « pondérer mes propos et d’éviter les accusations infondées envers leurs services ». La raison de cette polémique ? Avoir signalé la fausseté du document. On m’explique qu’il s’agit « simplement d’une erreur matérielle », je n’y crois pas un instant mais j’imagine que c’est certainement par manque de moyens matériels… (après le manque d’effectif) et « qu’en aucun cas le certificat est UN FAUX ». J’ose espérer que les documents juridiques établis par les tribunaux ne sont pas encore falsifiés. Quoi qu'il en soit le document était contraire à la vérité. Enfin, on me précise qu'ils ont « pris le temps de répondre à mes mails qu'ils qualifient d'insistant, quand bien même l'adresse mail ne m'était pas autorisée ». Je réalise qu'un traitement de faveur digne des plus grands privilégiés m'a été accordé, une chance incroyable...
Cette procédure totalement déshumanisée aurait largement pu être simplifiée, durer quelques jours, quelques semaines tout au plus et faire intervenir une ou deux personnes de l'administration. Elle s'est étendue sur plus de DEUX ANS et a sollicité une multitude d'intervenants divers et variés. Je pense qu’elle aurait pu s’étendre sur une année supplémentaire voir deux si j’étais passé par la Cour d’appel et si le pressing n’avait pas été fait pour obtenir les documents nécessaires au remboursement.
Être dans mes droits, faire reconnaître ma non-culpabilité par notre justice n’aura finalement pas été rentable. Le coût global des démarches nécessaires, entre frais de courrier, de déplacement plus la perte de rémunération liée à la journée d’absence pour le jugement aura largement dépassé le montant de l’amende à laquelle j’étais condamné. Sans compter la perte de temps et d'énergie que j’aurais dû mettre à profit de façon bien plus intéressante et constructive. Des préjudices irréparables de nature financière et morale sont donc réels.
Au delà du scandale des radars et du racket d'Etat en France, de la façon honteuse dont peut être traité un dossier de contestation par les autorités administratives, c'est véritablement le non-respect de la signalisation réglementaire en conformité avec un arrêté interministériel qui doit réellement interpeller. Si des PV ont été dressés en prenant en compte une vitesse maximale erronée, l'Etat ne devrait t-il pas légitimement s'acquitter de sa dette, en réparant rétroactivement le préjudice des éventuels usagés de la route injustement verbalisés ? Un panneau de signalisation 50 km/h installé durant de nombreuses années (à priori plus de 6 ans et demi) et non-conforme à un arrêté réglementant une vitesse de circulation limitée à 70 km/h, n'a t'il pas inévitablement entraîné un nombre considérable de contraventions illégales ?
Toute la lumière mériterait d'être faite sur cette affaire, probablement à plusieurs centaines de milliers d'euros.